Caméras HD et mégapixels : pas la panacée !
La vidéosurveillance n'en finit pas d'innover. Toujours plus de résolution, de puissance, de précision, de capacités.
Mais comment s'y retrouver?? Face au marketing des fabricants, l'utilisateur doit se poser les bonnes questions pour ne pas
se retrouver avec une solution bancale...
HD ? Full HD ? Mégapixels ? Existe-t-il des différences et comment s'y retrouver ? Face à l'offre vraiment pléthorique en matière de caméras de vidéosurveillance, les utilisateurs finaux peuvent avoir du mal à s'y retrouver. D'autant plus que leur perception des capacités réelles des caméras actuellement sur le marché est faussée par les élucubrations techniques du cinéma et des séries TV. « Quand on parle de caméras HD ou mégapixels, il faut bien expliquer à l'utilisateur qu'il n'y a pas de réelle différence, commence Pierre-François Verbecque, Regional Sales Manager chez Sony Professional Europe. C'est plutôt une histoire de format d'affichage. La HD affichera de l'image en 1080 x 720, la Full HD en 1920 x 1080, la 4K en 3840 x 2160, toutes ces résolutions répondent au format 16/9 qu’on retrouve sur la majorité des dispositifs d’affichage. Il y a donc intérêt à bien penser son installation en termes d'interface, de moniteurs… ».
On achète donc pas une caméra de surveillance comme on en choisit une pour filmer de la vidéo en famille, en vacances. « Une caméra de vidéosurveillance doit être capable de fournir des images de qualité de jour comme de nuit, ainsi que dans n’importe quelles conditions de luminosité », ajoute Pierre-François Verbecque.
Soulager le réseau
Les capacités énormes des caméras actuelles posent un vrai problème en matière de bande passante. Problème dont ne sont pas toujours conscients les utilisateurs et même certains installateurs. « Avec les caméras megapixels, le problème n'est pas tant de filmer que de transmettre les images. Il faut penser impérativement à soulager le réseau, explique Fabien Noyant, responsable des ventes chez Panasonic. Il faut impérativement éviter l'engorgement. Cela peut se faire grâce à l'intelligence embarquée dans les caméras qui sont capables d'analyser ce qui se passe et de ne transmettre que ce qui sera nécessaire à l'exploitant ».
Malgré les capacités embarquées des caméras, cela suppose tout de même de bien penser son infrastructure réseau. « Pour bien dimensionner son réseau, l'exploitant doit se demander ce qu'il veut voir et faire. Surveiller ou identifier, conseille Yannick Pagot, ingénieur avant-vente chez D-Link. Trop souvent encore, nous sommes face à des utilisateurs qui veulent des caméras pour avoir des caméras, sans se soucier de leur exploitation et des moyens nécessaires pour cette dernière. Il faut réfléchir à la bande passante, au logiciel de vidéosurveillance pour qu'il soit bien dimensionner. »
Attention aux annonces marketing
Le marché de la vidéosurveillance est très concurrentiel. Les fabricants lancent très régulièrement de nouvelles solutions. Toujours plus puissantes, techniques, pointues. Il y a évidemment derrière tout cela une démarche marketing. Certains annoncent déjà des résolutions de 10, voire 12 megapixels. Et on ne parle pas du 4k qui reste encore de l'ordre de la chimère étant donné les infrastructures actuellement disponibles en France. « On ne peut que conseiller à l'utilisateur de ne pas se laisser influencer par les annonces des fabricants. Il faut être capable de se poser et de réfléchir sereinement. La panacée n'existe pas en vidéosurveillance, insiste Xavier Sanchez, ingénieur commercial Axis Communications. Des résolutions de 10, 12 mecapixels ? Oui mais comment transporte-ton les images ? Sur quoi les affiche-t-on ? Il ne faut pas nous leurrer. Les utilisateurs investissent plus facilement actuellement dans les caméras que dans les outils d'exploitations (réseau, logiciels, solutions de stockage, d'affichage…). Il ne sert à rien de leur vendre des caméras super puissantes si derrière ils n'ont rien pour exploiter les images. À nous de les aider à digérer les investissements tranquillement pour qu'ils puissent monter en puissance tout aussi tranquillement ».
Tester le matériel
Tous les fabricants et installateurs sérieux insistent sur ce point : il faut tester le matériel. Chaque site a des caractéristiques et des contraintes particulières. Il faut donc essayer les caméras dans les conditions de leur utilisation. « Les utilisateurs ne sont pas assez conscients que les problématiques terrain qui peuvent varier d'un jour à l'autre jouent un rôle primordial dans le choix de la caméra. Il ne suffit pas de se doter d'une caméra 5 mégapixels pour obtenir obligatoirement des images de bonne qualité, explique Cédric Gonzalez, ingénieur avant-vente chez Hikvision. Il faut surtout veiller à choisir une caméra adaptée à ses besoins réels. D'où l'intérêt de tester le matériel sur site. » Le prestataire –?fabricant ou installateur?– joue donc un rôle très important en termes de conseil. Il doit être capable d'aider l'utilisateur à se poser les bonnes questions sur le niveau de la luminosité, la typologie de l'éclairage (avec l'éclairage sodium, les capteurs de caméras ne réagissent pas)… Le client doit exiger ces conseils et chercher un prestataire qui sera réellement capable de l'orienter en termes de faisabilité vers des solutions rationnelles. « Nous devons faire preuve de pédagogie, conclut l'installateur Sébastien Mauqué, segment systèmes du groupe Partenaire Sécurité. À nous de faire remonter les problématiques terrain avant l'installation. Elles sont souvent différentes de celles des showrooms. »

Le point de vue d’un fabricant
Patrice Ferrant
Directeur commercial et développement chez Mobotix France

« On oublie souvent la bande passante »
« Plusieurs problèmes se posent quand on parle de HD et de megapixels. On se focalise sur la capacité annoncée de la caméra sans se soucier de la qualité du capteur, qui est l'organe essentiel de la caméra. Il ne faut pas non plus oublier l'optique afin d'avoir des images de bonne qualité, même dans des conditions de basse luminosité. Il faut aussi tenir compte du codec. Actuellement le plus utilisé est le H.264 qui n'enregistre qu'1 megapixel. C'est pour ces raisons que je conseillerais aux utilisateurs de faire attention aux produits asiatiques qui ne sont pas toujours équipés d'un bon capteur. Il faut aussi tenir compte de l'infrastructure et de la bande passante. Soit, on décide de centraliser les flux d'images et il faut alors compresser pour consommer moins de bande passante. Soit, les caméras sont dotées de fonctions de traitement pour produire des flux moins consommateurs de bande passante »
Le point de vue d’un intégrateur
Sébastien Mauqué
Directeur du développement du groupe Partenaire Sécurité, pôle intégration et systèmes
« Sortir du pur marketing pour revenir au terrain… »
« Le monde de la vidéosurveillance HD et mégapixels se caractérise par une course sans fin chez les fabricants. Les innovations, ou les produits présentés comme tels, se succèdent à un rythme effréné, ce qui ne nous simplifie pas la tâche en tant qu'installateur pour exercer sereinement notre devoir de conseil auprès des clients. Nous sommes pris entre deux feux avec d’un côté le marketing agressif de certains fabricants, et de l’autre, des clients qui recherchent un résultat parfois en décalage, car biaisé par un surcroît d’informations d’importance négligeable au détriment des véritables problématiques. Les clients ont tendance à sous-estimer l'infrastructure qu'il faut mettre derrière les caméras. C'est une grosse erreur; car plus on monte en définition, plus on a besoin d'outils informatiques puissants pour transmettre, stocker et analyser les images. Et cela a un coût qui peut être élevé. Il ne suffit pas de monter en format d'image et en définition pour monter en qualité… Dans ce contexte, il est nécessaire de revenir aux fondamentaux de la vidéo comme le recueil précis du besoin fonctionnel, l’analyse de risques préalable et l’interaction avec d’autres systèmes de sûreté mécaniques ou électroniques, les études d’éclairement, notamment au luxmètre, les calculs de bande passante nécessaires, et surtout leur validation en amont par les DSI… À nous de rappeler à nos clients qu’il doivent faire le choix du système le mieux adapté aux risques en présence et aux conditions globales d’exploitation dont ils disposent. »
Le point de vue d’un utilisateur
Thierry Dostes
Responsable informatique circuit Paul Ricard
«Bien définir ses contraintes, pour bien choisir ses caméras »
« Nos caméras installées autour de la piste, nous permettent d'assurer la sécurité des pilotes, pompiers, commissaires de course, secours… D'autres caméras, plus anciennes, nous servent à lutter contre les actes de malveillance. De par notre activité, nous avons des besoins spécifiques en caméras. Il faut qu'elles soient capables de nous fournir des images de véhicules se déplaçant à des vitesses pouvant dépasser les 300 km/h avec un nombre d'images par seconde suffisant pour permettre d'analyser précisément les séquences vidéo en cas de fait de course. Par ailleurs, nous sommes également amenés à filmer en nocturne. Il nous faut donc disposer d'une solution vidéo qui peut réduire l'éblouissement dû aux phares des véhicules. Enfin, nous devons aussi pouvoir zoomer rapidement et précisément pour localiser et identifier un objet, une pièce sur la piste. Sony a été capable de nous proposer une solution qui sort simultanément des flux Full HD et analogiques après nous avoir présenté leur solution et permis de la tester. Nous avons donc installé 32 caméras Full HD SNC-WR632 dont l’excellente qualité d’image et les caractéristiques techniques répondent parfaitement à nos prescriptions. »